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QUAND LES ELITES REJETTENT LE PEUPLE PAR CHRISTIAN CHAVAGNEUX DANS ALTERNATIVES ECONOMIQUES

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Le vote pour le Brexit au Royaume-Uni, la place annoncée au deuxième tour de la présidentielle pour Le Front National en France, la montée des partis populistes extrêmes en Europe, Donald Trump choisi par des millions d'Américains comme candidat à la direction de la première puissante mondiale. La cause est entendue : tout cela manifeste le rejet des élites par le peuple.

Ou pourrait bien sûr s'amuser à rappeler que le champion du Brexit Boris Johnson sort d Eaton et Oxford le parcours élitaire britannique classique que Trump est milliardaire, etc. Bref comme représentant du peuple, on fait mieux ! Mais le problème est plus grave. Les cause de ces évolutions politiques délétères se trouve dans le rejet du peuple par les élites politiques et économiques.

L'abandon des politiques.

Dans son «  Discours sur l'économie politique » publié en 1755 dans L'encyclopédie,Jean Jacques Rousseau nous avait prévenu : «  Le plus grand mal est déjà fait quand à des pauvres à défendre et des riches à contenir ». Le travail de Thomas Piketty a mis des chiffres sur une réalité sociale vécue dans de nombreux pays:les riches s'enrichissent vite et les pauvres voient peu de possibilités d'améliorer leur condition. Les études récentes d'autres spécialistes Branko Milanovic ou Anthony Atkinson sont venues confirmés le constat.

Qui est responsable de cette situation ? Les partis conservateurs non seulement s'en moquent, mais ils font même tout pour accentuer la tendance des riches à s'enrichir. Il n'y a qu'à regarder les propositions des candidats aux primaires de la droite française qui promettent moins d'impôts pour les riches et moins de redistribution par l'Etat-providence.

De leur côté, les partis sociaux démocrates ont abandonné le combat : c'est désormais appartenir à la gauche ringarde et passéiste que vouloir défendre les pauvres et encore plus de contenir les riches.

Quant aux patrons du CAC, payés en moyenne chaque année près deux siècles et demi de SMIC ou soixante dix ans de la vie active d'un cade moyen, ils vivent dans un autre monde que celui de la majorité des gens.

Dans la ferveur révolutionnaire montante de 1788 l’abbé Sieyès dénonçait, dans son Essai sur les privilèges , cette volonté de rupture des élites économiques et politiques : «  Je le vois vous demandez moins àêtre distingués par vos concitoyens que vous ne cherchez àêtre distingué de vos concitoyens ».

Nos sociétés finissent par subir les coûts de cet abandon. « Les pauvres », en fait tous ceux qui subissent ou se sentent menacés par le déclassement, en arrivent à se rebeller. Leur révolte passe aujourd'hui par le rejet de l'étranger-l'immigré, l'Europe, la mondialisation- et de ceux tenus pour responsables de leur situation, dans le désordre, le riche, Bruxelles, le patron, la Chine, l'énarque, l'homme politique etc.

Une révolte qui reste pour l'instant pacifique car essentiellement électorale. La conséquence la plus dommageable en a été jusqu'à présent le Brexit. En attendant des résultats électoraux plus dramatiques ?

Ce serait d'abord à nos élites d'éviter cela mais, comme l'écrivais l'économiste libéral anglais John Stuart Mill 1848 dans ses Principes d'économie politique, « toutes les classes privilégiées et puissantes ont utilisé leur pouvoir au profit de leur égoïsme ».Et nous ne ne faisons que commencer à en payer le prix.

Christian CHAVAGNEUX

Alternatives Économiques

n° 360 septembre 2016.

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